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Publié le 6 Fév 2022

Conséquences d’une rescision pour vente après une revente

En cas de rescision pour lésion avérée, (1) les biens doivent être restitués au propriétaire initial, (2) le vendeur initial doit seulement reverser le prix de vente initial et (3) le remboursement du premier acquéreur au deuxième acquéreur est limité au montant effectivement versé au vendeur initial, ce tiers acquéreur bénéficiant par ailleurs du recours en garantie contre son propre vendeur pour le surplus.

Pour mémoire, aux termes de l’article 1674 du code civil, le vendeur qui a été lésé de plus de sept douzièmes dans le prix d’un immeuble a le droit de demander la rescision de la vente, quand bien même il aurait expressément renoncé dans le contrat à la faculté de demander cette rescision, et qu’il aurait déclaré donner la plus-value.

S’il est constant que la lésion ne saurait se concevoir dans un transfert de propriété déterminé par une intention libérale, il résulte de l’article 893 du même code que la libéralité ne se présume pas en ce qu’elle constitue un acte par lequel une personne dispose à titre gratuit de tout ou partie de ses biens ou de ses droits au profit d’une autre personne.

En l’espèce, les lots n° 1 et n° 11 dépendant d’un ensemble immobilier en copropriété ont été vendus une première fois le 11 juin 2013 par la SEP Jacquot Danjoutin 39, composée des sociétés CMG Immo et FCP Immo et ayant pour co-gérants M. Charles G. et M. Christian F., à M. F. au prix de 25 000 euros, puis une seconde fois le 29 août 2013 par M. F. à M. Jacques F. au prix de 95 000 euros.

Par exploit d’huissier délivré le 10 juin 2015, la société CMG Immo et M. G. ont fait assigner M. F. devant le tribunal de grande instance de Belfort en rescision pour lésion de la première vente du 11 juin 2013, puis ont fait intervenir M. F. à l’instance par acte du 5 mars 2016

Si la lésion ne peut se concevoir dans un transfert de propriété déterminé par une intention libérale, la libéralité ne se présume pas et il apparaît en l’espèce que la lésion des 7/12èmes du prix de vente de l’immeuble est caractérisée, en ce que l’expertise a conclu à une valeur vénale de l’immeuble de 107 366 euros, alors qu’il a été cédé au prix de 25 000 euros.

Enfin, la restitution du prix payé au tiers possesseur prévue par l’article 1681 du code civil en contrepartie de la restitution du bien concerné est nécessairement limitée au montant effectivement versé au vendeur initial, ce tiers acquéreur bénéficiant par ailleurs du recours en garantie contre son propre vendeur pour le surplus.

En d’autres termes, le jugement critiqué sera confirmé en ce qu’il a ordonné la rescision de la vente intervenue le 11 juin 2013 entre la SEP Jacquot Danjoutin 39 et M. F. et a ordonné la restitution des lots concernés par M. F. au profit des sociétés CMG Immo et FCP Immo, représentée par son liquidateur judiciaire et a condamné la société CMG Immo à payer à M. F. la somme de 25 000 euros correspondant au prix payé par M.F.

M. F. étant tenu, en sa qualité de revendeur intermédiaire, à garantir l’acheteur final aux termes des dispositions susvisées, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a condamné M. F. à payer à M. Jacques F. la somme de 70 000 euros sauf en ce qu’il l’a assortie des intérêts au taux légal à compter du 29 août 2013 alors que ceux-ci doivent être décomptés à partir de la date du jugement de première instance en application de l’article 1231-7 alinéa 2 du code civil.

En raison de la revente du bien, la restitution du prix payé au tiers possesseur en contrepartie de la restitution du bien concerné est nécessairement limitée au montant effectivement versé au vendeur initial, le tiers acquéreur bénéficiant par ailleurs du recours en garantie contre son propre vendeur pour le surplus.

Cour d’appel, Besançon, 1re chambre civile et commerciale, 18 Janvier 2022 n°19/02514

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