L’effet de la mesure gouvernementale d’interdiction de recevoir du public pendant la période COVID, qui est générale, temporaire et sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du Code civil. Le locataire à bail commercial doit donc régler tous les loyers y compris pendant la période de fermeture.
Pour mémoire, aux termes de l’article 1722 du Code civil, si, pendant la durée du bail , la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail commercial est résilié de plein droit.
Si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail .
Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement.
Dans trois décisions rendues le même jour statuant sur l’exigibilité des loyers résultant des baux commerciaux pendant les périodes de fermetures administratives dites COVID-19, la Cour de Cassation avait déjà rejeté les oppositions des locataires fondées sur l’obligation de délivrance (article 1719 du Code Civil), la perte de la chose louée (article 1722 du Code Civil) et la force majeure (Cour de cassation, 3e chambre civile, 30 Juin 2022 n°21-20.190 ; Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 30 juin 2022, n°21-20.127 ; Cour de cassation, 3e chambre civile, 30 Juin 2022 n°21-19.889).
Plus récemment encore, la Cour de Cassation a rappelé que l’effet de la mesure gouvernementale d’interdiction de recevoir du public fut générale et temporaire et sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué. En conséquence, cette mesure ne peut être assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du code civil et le locataire doit régler ses loyers. (Cour de cassation, 3e chambre civile, 15 Juin 2023 n°22-15.368)
En l’espèce, la bailleresse, propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail commercial les 19 avril 2016 et 19 août 2018 à une locataire pour une activité d’établissement scolaire, a délivré à celle-ci par actes des 23 juin 2020 deux commandements de payer des arriérés de loyers et de charges visant les clauses résolutoires insérées aux baux, puis l’a assignée, ainsi que M. [V], qui s’était porté caution solidaire des obligations de la locataire dans le bail du 19 avril 2016, en constat de l’acquisition de ces clauses, prononcé d’une mesure d’expulsion et paiement de provisions.
Débouté de ses demandes, la bailleresse fait grief à l’arrêt de limiter la condamnation de la locataire au titre des provisions à une certaine somme en y retirant les sommes dues pendant les périodes non fermées au titre du COVID-19 et a déduit au titre de la perte de la chose louée celles dues entre le 14 mars et le 11 mai 2020.
La Cour de cassation censure la cour d’appel sur l’exigibilité des loyers en considérant que l’effet de la mesure gouvernementale d’interdiction de recevoir du public, générale et temporaire et sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du Code civil.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 7 Mai 2025 n° 24-10.097