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Publié le 2 Oct 2016

Réputation non écrite des clauses de surprimes d’assurance

La clause du règlement de copropriété qui a pour effet de faire supporter la surprime d’assurance par un seul copropriétaire ou certains d’entre eux seulement doit être réputée non écrite.

Lorsqu’une activité potentiellement dangereuse se déroule dans les parties privatives d’un lot, le règlement de copropriété peut-il valablement faire peser sur le copropriétaire exerçant cette activité la charge de la surprime d’assurance exigée par l’assureur de l’immeuble en raison d’un accroissement du risque ?

L’équité conduit à apporter à cette question une réponse positive.

Comme l’a affirmé une décision des juges du fond, « le fait d’exercer dans l’immeuble une activité dont le caractère dangereux entraîne un risque anormal pour les autres copropriétaires, et donc l’obligation pour le syndicat de payer une surprime d’assurance, justifie l’application de la clause d’aggravation des charges insérée au règlement de copropriété au préjudice [du copropriétaire] » (Paris, 8 déc. 2010, n° 09/14645).

En décider autrement équivaudrait en effet « à faire supporter à la collectivité des copropriétaires une dépense qui est la contrepartie exclusive de l’activité exercée par un seul d’entre eux dans les lots appropriés par celui-ci » (Paris, 14 avr. 2010, Loyers et copr. 2010, n° 264, obs. G. Vigneron).

En l’espèce, dans la continuité de cette jurisprudence plein de bon sens, les juges avaient validé les stipulations du règlement de copropriété faisant peser sur l’exploitant d’un local commercial à usage de dancing les surprimes consécutives à l’utilisation particulière de ses parties privatives.

Cette décision a été censurée par la Cour de cassation qui a réaffirmé à cette occasion que « la clause du règlement de copropriété qui a pour effet de faire supporter la surprime d’assurance par un seul copropriétaire ou certains d’entre eux seulement doit être réputée non écrite ».

Cette solution procède d’une application rigoureuse des articles 10, alinéa 2 et 43 de la loi du 10 juillet 1965, au visa desquels elle est affirmée.

Le premier de ces textes énonce en effet que les copropriétaires sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation […] des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leur lot, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5, c’est-à-dire sans égard à leur utilisation.

Or, dès lors que l’assurance souscrite par le syndicat vise à garantir l’ensemble de l’immeuble et porte aussi bien sur les parties communes que les parties privatives, le paiement des primes constitue une charge relative à la conservation des parties communes.

Étant souscrites dans l’intérêt de l’ensemble des copropriétaires, ces primes ont la nature de « charges générales » (Civ. 3e, 4 juin 2009, n° 08-14.889).

La clause qui a pour objet de faire supporter la surprime par le copropriétaire qui en est responsable, contrevenant à une disposition d’ordre public du statut de la copropriété, doit donc être réputée non écrite (Civ. 3e, 17 mars 2010, n° 09-12196 ; Paris, 15 sept. 2010, n° 08/20919, 6 sept. 2011, n° 10-18972).

Les stipulations litigieuses du règlement de copropriété ne sauraient à cet égard être sauvées par le recours à la notion de clause d’aggravation des charges.

L’application de cette dernière requiert, en effet, la constatation judiciaire d’une faute commise par le copropriétaire dont le fait aurait accru les charges communes (Civ. 3e, 27 mars 2013, n° 12-13012).

Or, l’exercice d’une activité, même potentiellement dangereuse et dès lors qu’elle est conforme aux prévisions du pacte commun, ne constitue « ni un fait, ni une faute mais résulte simplement de l’application du règlement de copropriété » (Civ. 3e, 22 mai 2013, n° 12-16217).

La soumission des clauses d’imputation des surprimes à la sanction édictée par l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 emporte deux conséquences:

  • D’une part, il est bien évident que la stipulation est privée irrémédiablement d’effet pour l’avenir.
  • D’autre part, étant non avenue par le seul effet de la loi, elle est censée n’avoir jamais existé. Dès lors, dans l’hypothèse où le copropriétaire se serait volontairement acquitté de cette contribution illicite, il est en droit d’en demander au syndicat le remboursement puisque le prononcé du caractère non écrit de la clause a « un caractère rétroactif, dans les limites de la répétition de l’indû » (Paris, 7 mars 2013, n° 11/17679) soumise à la prescription quinquennale visée par l’article 2224 du code civil (Civ. 3e, 8 févr. 2012, n° 10-25.951). 

Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 8 septembre 2016, 15-17000

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