Dans la catégorie :
Publié le 9 Déc 2019

Nullité du congé remis en mains propres et conséquences

Un congé remis en mains propres contre émargement est nul et le preneur doit payer au bailleur toutes les sommes dues jusqu’au terme de la période triennale.

En l’espèce, selon acte sous seing privé du 1er décembre 2011, la SCI Alie-nor a consenti à la SARL Prem Dépôt Logistique (PDL) un bail commercial portant sur un local de 650 m².

Le preneur a entendu résilier le bail par courrier du 6 mai 2014 à effet au 31 décembre 2014 et par courrier du 24 novembre 2014, le bailleur a opposé l’absence de validité d’un congé donné par courrier et non par acte extra judiciaire.

Saisi en référé le président du tribunal de grande instance de Libourne a ordonné une expertise et rejeté la demande en paiement de sommes à titre de provision sur les loyers impayés par décision du 16 avril 2015, laquelle a été frappée d’appel.

Par acte d’huissier du 15 avril 2015, la société PDL a fait assigner la société Alie-nor devant le tribunal de grande instance de Libourne aux fins à titre principal de validation du congé.

Par jugement contradictoire du16 juin 2016, le tribunal de grande instance de Libourne a validé le congé délivré par la SARL Prem Dépôt Logistique à la SCI Alie-nord concernant le local situé et condamné la SARL Prem Dépôt Logistique à payer à la SCI Alie-nor la somme de 10 800 euros,

Le bailleur a interjeté appel de la décision.

En droit, à la date où le congé a été délivré, les dispositions de l’article L 145-4 du code de commerce, antérieure à la loi du 18 juin 2014, imposaient pour le congé à l’issue d’une période triennale la forme d’un acte extra judiciaire.

Le congé délivré par remise en main propre contre émargement du bailleur ne respecte pas cette forme. Il ne respecterait d’ailleurs pas davantage la forme issue de la loi dite Pinel, laquelle prévoyait une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

C’est bien la nullité qui est encourue à ce titre.

S’il s’agit d’une nullité relative, cela emporte seulement la possibilité d’une ratification et non les conséquences que les premiers juges en ont tirées.

Il ne peut être imposé à celui qui se prévaut de la nullité, en l’espèce le bailleur destinataire d’un congé qui ne revêtait pas la forme prévue, la preuve d’un grief.

En effet, le régime de la nullité n’est pas celui des vices de formes entachant les actes de procédure et donc de l’article 114 du code de procédure civile.

La cour ne peut que constater qu’en délivrant le congé sous la forme d’un courrier remis en main propre, le preneur n’a pas satisfait à une formalité obligatoire.

C’est ainsi la nullité du congé qui est encourue et le jugement ne peut qu’être réformé de ce chef. Il convient donc d’en apprécier les conséquences.

A ce titre, le bailleur réclame le paiement des loyers pour la seconde période triennale de janvier 2015 à décembre 2017, soit 167 422,32 euros TTC dont il déduit la somme de 24 000 euros perçue en paiement de loyers au titre d’une location précaire et partielle des dits locaux en 2016/2017. Il réclame en outre la somme de 12 035,41 euros au titre de la taxe foncière due pour 2015 et 2016 et les loyers dus jusqu’à l’issue de la période triennale en cours et le cas échéant la suivante en l’absence de congé valablement formalisé.

Il ressort des écritures et pièces des parties que la locataire a quitté les lieux le 31 décembre 2014 et que le bailleur avait les clés de ses locaux à disposition, selon les termes de l’ordonnance du juge de référés du tribunal de grande instance de Libourne en date du 16 avril 2015, au plus tard à compter de cette date, qu’il a pu les relouer au moins partiellement, selon ses propres dires pour douze mois à compter du 1er décembre 2016, selon un bail renouvelable sous conditions.

Le bailleur demande le paiement des loyers pour la période de janvier 2015 à décembre 2017, soit la somme de 167 422,32 euros TTC diminuée de celle de 24 000 euros perçue en paiement de loyers au titre de la location de 2016/2017.

La demande de paiements de loyers postérieurs au 31 décembre 2017 est présentée en forme hypothétique non chiffrée et non actualisée, elle ne peut qu’être rejetée par la cour en l’absence de justifications particulières. C’est donc bien la somme de 143 422,32 euros qui est due par la locataire pour des loyers non payés au titre du bail querellé.

Cour d’appel, Bordeaux, 4e chambre civile, 6 Février 2019 n° 16/04519

Les derniers articles

Bail commercial

Bail Commercial : Interdiction des BEFA avec les personnes publiques

Un contrat de bail en l’état futur d’achèvement avec option d’achat encourt l’annulation s’il est qualifié de marché de travaux, les loyers étant alors regardés ...
Lire la suite →
Bail commercial

Bail d’habitation : Trouble anormal du voisinage

Depuis le 17 avril 2024, un nouvel article 1253 dans le Code civil reprenant le principe de la responsabilité fondée sur les troubles du voisinage ...
Lire la suite →
Bail d'habitation

Bail d’habitation : Erreur sur la surface et délai pour agir

En matière de bail d’habitation, à défaut d’accord avec le bailleur dans le délai de deux mois de sa demande en diminution, le locataire doit ...
Lire la suite →