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Publié le 10 Avr 2023

Jamais sans séquestre

Une cession de fonds de commerce, qui s’opère sans séquestre, ne libère pas l’acquéreur des créanciers inscrits sur le fond. Dès lors, en cas de liquidation judiciaire de la société cédante, le liquidateur peut obtenir, du cessionnaire, remboursement de la somme perçue à hauteur du passif.

Pour mémoire, la combinaison des articles L. 141-12, L. 141-14 et L. 141-17 du code de commerce que l’acquéreur d’un fonds de commerce, qui paie son vendeur avant l’expiration du délai de dix jours suivant la publication de la vente, ouvert aux créanciers du précédent propriétaire pour former opposition au paiement du prix, n’est pas libéré à l’égard des tiers.

Pour être précis l’article L 141-17 du Code de Commerce dispose que:

« L’acquéreur qui paie son vendeur sans avoir procédé aux publications prescrites, ou avant l’expiration du délai de dix jours, n’est pas libéré à l’égard des tiers. »

Les créanciers du vendeur d’un fonds de commerce étant des tiers, au sens de l’article L. 141-17 précité, qu’ils aient ou non, fait opposition au paiement du prix, le paiement fait au vendeur du fonds, avant l’expiration du délai d’opposition, leur est inopposable.

De plus, l’article L622-20 du Code de commerce prévoit :

« Le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers. Toutefois, en cas de carence du mandataire judiciaire, tout créancier nommé contrôleur peut agir dans cet intérêt dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.(..) ».

En outre, s’agissant de la liquidation judiciaire, l’article L641-4 du Code de commerce prévoit :

« Le liquidateur procède aux opérations de liquidation en même temps qu’à la vérification des créances. Il peut introduire ou poursuivre les actions qui relèvent de la compétence du mandataire judiciaire

(…) ».

En synthèse, le liquidateur est donc, seul, en mesure d’agir au nom et dans l’intérêt collectif des créanciers, afin de reconstituer leur gage commun.

En l’espèce, dans le cadre d’une cession de fonds de commerce, la société cessionnaire s’était directement libérée entre les mains de la société cédante d’une partie du prix de vente du fonds de commerce de cette société, avant l’expiration du délai de dix jours suivant la publication de la vente.

La société cédante restait débitrice d’un passif certain d’un montant de 564 083,25 euros.

Un an plus tard, la société cédante est placée en liquidation judiciaire. Le liquidateur poursuit alors le cessionnaire en paiement d’une partie du prix de vente du fonds, équivalente au montant du passif de la société cédante. En réaction, le cessionnaire appelle en garantie le cabinet d’avocats, rédacteur d’acte.

Dès lors, l’action du liquidateur, fondée sur les dispositions de l’article L. 141-17 du code de commerce, destinée à obtenir de l’acquéreur du fonds de commerce les sommes par lui versées au vendeur avant l’expiration du délai d’opposition, tendait à la reconstitution du gage commun des créanciers de la procédure et relevait dès lors des actions qu’il avait seul qualité pour exercer dans l’intérêt collectif de ces créanciers.

En d’autres termes, pour être libéré de toute garantie, le prix n’aurait dû être libéré qu’après la purge du délai d’opposition de 10 jours vis à vis des créanciers inscrits.

Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 8 mars 2023, 21-18.677

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