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Publié le 3 Déc 2023

Expulsion et saisie des loyers COVID 19

Pendant les périodes COVID ou restriction d’activité, dès lors que le locataire à bail commercial rempli les conditions d’éligibilité, toute action, sanction ou voie d’exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives dus pour une période, même antérieure au 17 octobre 2020, ne peut pas être engagée.

Pour mémoire, selon l’article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020, applicable à compter du 17 octobre 2020, jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d’être affectée par une mesure de police administrative prise en application des 2° ou 3° du I de l’article 1 de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 ou du 5° du I de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, les personnes morales de droit privé satisfaisant à plusieurs critères d’éligibilité ne peuvent encourir toute action, sanction ou voie d’exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives dus pour une période, même antérieure au 17 octobre 2020, au cours de laquelle leur activité économique est affectée par l’une des mesures de police précitées.

Comprenant les dispositions réglementant l’ouverture au public, y compris les conditions d’accès et de présence, d’une ou de plusieurs catégories d’établissements recevant du public, ces mesures de police incluent l’obligation, instituée par les articles 40 du décret n° 2020-663 du 31 mai 2020 et 40 du décret n° 2020-860 du 10 juillet 2020, pour les établissements recevant du public de type N, restaurants et débits de boissons, de n’accueillir du public:

– qu’à la condition que les personnes accueillies aient une place assise,
– qu’une même table ne regroupe que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de dix personnes,
– et qu’une distance minimale d’un mètre soit garantie entre les tables occupées par chaque personne ou groupe de personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, sauf si une paroi fixe ou amovible assure une séparation physique.

Dès lors, c’est à tort qu’une cour d’appel a retenu que les dispositions de l’article 14 de la loi du 14 novembre 2020 n’étaient pas applicables à des impayés de loyers échus à une période pendant laquelle l’activité de restauration du locataire à bail commercial était affectée par les mesures susvisées.

En l’espèce, le 15 janvier 2019, la société civile immobilière 81 (la bailleresse) a renouvelé un bail commercial consenti à la société Simple (la locataire), et portant sur des locaux à usage de restauration, salon de thé et accessoirement vente à emporter.

En raison de la crise sanitaire liée au virus covid-19 et des mesures gouvernementales interdisant la réception du public dans les restaurants, la locataire a, le 29 avril 2020, avisé la bailleresse de la suspension du paiement du loyer du deuxième trimestre 2020.

Une ordonnance de référé du 20 janvier 2021 a constaté l’acquisition, au 19 novembre 2020, de la clause résolutoire insérée au bail et a condamné la locataire au paiement d’une certaine somme à titre de provision à valoir sur l’arriéré de loyers, charges et indemnités d’occupation, y compris le quatrième trimestre 2020.

En exécution de cette décision, la bailleresse a, le 23 février 2021, fait dresser un procès-verbal de reprise des locaux loués puis, le 12 mars 2021, a procédé à la saisie-attribution d’un compte bancaire ouvert au nom de la locataire.

Le 16 mars 2021, la locataire a assigné la bailleresse en annulation du procès-verbal de reprise des locaux loués et mainlevée de la saisie-attribution.

La Cour d’appel considère que le décret du 31 mai 2020 a autorisé les établissements accueillant du public à reprendre leur activité sous certaines conditions qu’il appartenait à la locataire de respecter.

Ainsi, une partie des loyers impayés, à savoir ceux échus du mois d’août au mois d’octobre 2020, serait alors devenue exigible alors que l’activité de la locataire n’était pas affectée par des mesures de police, de sorte que la reprise des lieux loués et la saisie-attribution du 12 mars 2021 étaient régulières.

La Cour de Cassation censure ce raisonnement.

En effet, en statuant ainsi, alors que l’obligation d’accueillir les personnes à une place assise, de ne recevoir que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de dix personnes, et de respecter une distance minimale d’un mètre entre les tables, sauf installation d’une paroi fixe ou amovible assurant une séparation physique, constituait une mesure de police réglementant les conditions d’accès et de présence du public, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Ainsi, la Cour d’appel de renvoi devra de nouveau statuer sur l’annulation du procès-verbal de reprise des locaux et la saisie attribution.

Cour de Cassation 3ème Chambre Civile, 30 novembre 2023 n° 22-14.594

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