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Publié le 25 Sep 2022

Arrêté de péril et résiliation aux torts du locataire

Le bail doit être résilié aux torts du locataire qui s’oppose à la réalisation des travaux en exigeant d’être relogé et ce même en présence d’une procédure d’arrêté de péril.

Pour mémoire, il résulte des articles 1719 du code civil et 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs que le bailleur est obligé de délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent, en bon état d’usage et de réparation.

En application des articles 1728, 2° du code civil et 7 a) de la loi du 06 juillet 1989, le locataire est tenu de l’obligation essentielle et primordiale de payer le loyer et les charges au terme convenu sauf à démontrer que le logement est affecté de désordres si importants qu’il y a impossibilité d’utiliser les lieux conformément à leur destination ; des points d’indécence ne sont à cet égard pas suffisant pour caractériser une inhabitabilité et exonérer le locataire de son obligation de payer les loyers.

Pour justifier du caractère indécent du logement, le locataire verse aux débats les éléments suivants :

– un courrier de la direction du logement et de l’habitat de la mairie du 15 mars 2018 mentionnant que le logement a subi un dégât des eaux à la suite d’une fuite sur des canalisations, cette fuite ayant été réparée, mais le plafond et le mur de droite du cagibi étant très abîmés, la peinture écaillée et une partie des plafonds étant tombée au sol ;

– un rapport dans le cadre d’une procédure de péril ordinaire du 25 juin 2018 mentionnant les désordres constatés : effondrement d’un faux plafond sur 1 m2, renforts métalliques associés à la structure bois corrodés, ossature secondaire en très mauvais état, et faux plafond encore stable mais déformé ; ainsi que les mesures préconisées : purge de la sous-face du plancher afin de faire tomber les parties instables, réparer les parties de la structure du plancher haut n’assurant plus une stabilité et une solidité suffisante, exécuter tous les travaux annexes notamment réparer les tuyaux fuyards et enjoignant au bailleur de procéder aux travaux sous peine de la prise d’un arrêté de péril ;

– un courrier de la direction du logement et de l’habitat du 14 janvier 2019 mentionnant que le plafond de la chambre est infiltré et que la plaque en zinc posée sur le haut du mur de la toiture présente un manque d’étanchéité ainsi que le mur pignon situé en dessous de cette plaque, ce qui provoque des infiltrations dans le logement ;

– un rapport dans le cadre d’une procédure de péril ordinaire du 18 février 2019 mentionnant qu’un devis avait été transmis par le bailleur en décembre 2018 prévoyant la réalisation de sondages et de confortations, et enjoignant au bailleur de faire procéder à la purge des planchers hauts des deux logements du rez-de-chaussée et du premier étage, la réparation des parties de la structure du plancher n’assurant plus la solidité suffisante et la parfaite sécurité de la structure du plancher situé entre le logement du rez-de-chaussée et celui du premier étage ;

– un courriel du 8 juillet 2019 adressé par la direction du logement et de l’habitat indiquant qu’il avait pris note que le locataire s’opposait à la réalisation des travaux sur site occupé et conseillait au bailleur de saisir le tribunal en référé d’heure à heure pour procéder aux travaux nécessaires ;

– l’assignation devant le juge des référés du 12 juillet 2019 introduite par le bailleur en vue de l’autoriser à pénétrer dans le logement sous astreinte afin de réaliser les travaux utiles à la levée de la situation de péril et évalués à deux semaines ;

– un courrier du 3 mars 2020 de la direction du logement et de l’habitat constatant l’existence des désordres suivants : revêtements des murs et plafonds très détériorés par des infiltrations, une partie de la sous-face du plafond manquante et l’absence de système de ventilation permettant une aération satisfaisante.

S’il résulte des éléments de la procédure administrative que le bailleur a été enjoint de procéder à des travaux de réparation des structures du logement en raison d’infiltrations ayant entraîné l’effondrement d’une partie du faux plafond, la preuve d’une insalubrité de ce logement et de l’impossibilité d’habiter les lieux n’est pas rapportée, le preneur se maintenant d’ailleurs dans les lieux jusqu’à aujourd’hui.

En outre, il résulte des éléments produits que les travaux à l’intérieur du logement n’ont pas pu être réalisés par le bailleur à compter de décembre 2018, date de la production d’un devis signé, en raison de l’opposition du locataire qui a refusé l’accès à son logement au cours du premier semestre 2019, au motif qu’il souhaitait être relogé pendant la durée des travaux, ce qui a entraîné la saisine du juge des référés afin d’autoriser le bailleur à pénétrer dans le logement.

Par conséquent, la demande du locataire aux fins de suspendre le paiement des loyers n’est pas fondée, même partiellement, le retard dans la réalisation des travaux étant dû à l’opposition du locataire.

De même, les loyers étant restés partiellement impayés entre janvier 2018 et février 2019, la clause résolutoire a produit ses effets le 21 mai 2019, soit deux mois après le commandement de payer conformément aux dispositions d’ordre public de l’article 24-I de la loi du 6 juillet 1989.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a rejeté la résiliation du bail à compter du 21 mai 2019.

Cour d’appel, Paris, Pôle 4, chambre 3, 19 Mai 2022 n°19/22842

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