Ne constitue pas une défense au fond permettant de faire requalifier un titre d’occupation en bail commercial passé un délai de deux ans (article L 145-60 du Code de Commerce) suivant la signature de l’acte, le fait pour le locataire de demander le paiement d’une indemnité d’éviction.
En l’espèce, le 1er octobre 2007, l’Institut du Monde Arabe a conclu avec la société Noura IMA, devenue la société Pavillon Oriental Traiteur, un contrat de prestations de service de restauration », qui stipulait qu’il ne constituait pas un bail commercial, mais une mise à disposition des locaux, et aux termes duquel la société, qualifiée de délégataire de service, s’est vu confier, pendant une durée de dix ans à compter du 1 octobre 2007, l’exploitation des espaces de restauration situés sur le site, moyennant une redevance.
Au terme de la convention, l’Institut du Monde Arabe a assigné à jour fixe la société Noura IMA en expulsion.
La société Noura IMA a appelé en intervention forcée la société Miyou, à laquelle l’Institut du Monde Arabe avait mis les lieux à disposition.
La société Noura demandait d’une part la requalification en bail commercial de son titre d’occupation et d’autre part le paiement d’une indemnité d’éviction.
La cour d’appel a considéré que la demande de requalification en bail commercial était prescrite en application de l’article L 145-60 du Code de Commerce.
En effet, la Cour de Cassation considère que la cour d’appel a exactement retenu que constitue une défense au fond tout moyen qui tend à faire rejeter comme injustifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l’adversaire, ce qui la différencie de la demande reconventionnelle, par laquelle, en application de l’article 64 du code de procédure civile, le défendeur originel tend à obtenir un avantage autre que le simple rejet des prétentions de son adversaire.
Elle a constaté que la société Noura IMA ne se bornait pas à solliciter le rejet de la demande d’expulsion formée par l’Institut du Monde Arabe en invoquant la soumission du contrat au statut des baux commerciaux, ce qui lui le ferait bénéficier du droit au maintien dans les lieux, mais entendait voir tirer toutes les conséquences de la requalification du contrat en demandant le paiement d’une indemnité d’éviction à fixer, dont la reconnaissance conditionnait le droit au maintien dans les lieux.
Elle a retenu que la société Noura IMA tendait ainsi à se voir octroyer un avantage autre que le seul rejet de la demande d’expulsion de son adversaire.
Elle en a exactement déduit qu’une telle prétention ne constituait pas un moyen de défense, mais une demande reconventionnelle qui visait à la requalification du contrat et qui, formée plus de deux ans après la conclusion de celui-ci, était prescrite.
En d’autres termes, la société Noura IMA aurait simplement dû opposer l’application du statut des baux commerciaux à son titre d’occupation sans en tirer les conséquences.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 22 Octobre 2020 n° 18-25.111