Dès son acquisition, l’acquéreur d’un immeuble loué est tenu envers le locataire d’une obligation de réaliser les travaux nécessaires à la délivrance conforme du bien loué alors même que cette obligation incombait au précédent bailleur.
Pour mémoire, en application de l’article 1719 du Code Civil, le bailleur est tenu envers son locataire d’une obligation de délivrance.
La jurisprudence en la matière considère que » la vente de l’immeuble ne dispense pas le précédent bailleur de son obligation d’effectuer les travaux qui se sont avérés nécessaires lorsqu’il était propriétaire et lui incombaient » et que » le précédent bailleur était tenu d’indemniser la locataire du trouble de jouissance subi du fait de la non-exécution des travaux qui lui incombaient alors en sa qualité de propriétaire, et que ce trouble ne cessait que par l’exécution de ces travaux » (Civ. 3e, 14 nov. 2007, n° 06-18.430)
En l’espèce, la société Le Mojito est titulaire d’un bail portant sur un immeuble à usage commercial et d’habitation et consenti par la société Côté mer, qui a été condamnée, par jugement du 26 avril 2016, à faire réaliser des travaux sur l’immeuble.
En appel, elle a demandé la condamnation in solidum de la société Pink invest, devenue, aux termes d’un jugement du 7 juin 2016, adjudicataire de l’immeuble donné à bail, à réaliser les travaux.
La société PINK INVEST a interjeté appel sur le fondement de l’article 1743 du Code Civil qui prévoit que la vente du bien loué opère transfert du contrat de bail entre le vendeur et l’acquéreur, mais sans rétroactivité. Elle soutient qu’il ne pouvait pas donc lui être reproché les problématiques ayant pris naissance avant qu’elle ne devienne propriétaire.
Faux, lui répond la Cour de Cassation.
En effet, s’il est vrai que le vendeur du bien loué, ayant manqué à son obligation de délivrance conforme, doit en subir les conséquences (y compris pour la période postérieure à la vente : Civ. 3e, 14 nov. 2007, préc.) en étant condamné à effectuer les travaux de réparation nécessaires, le nouveau propriétaire n’est pas exonéré de sa responsabilité si à compter de l’acquisition le dommage persiste.
L’acquéreur du bien loué ne peut quant à lui se voir reprocher les effets de ce manquement pour la période antérieure à son acquisition.
Ainsi, à partir du moment où il est devenu propriétaire du bien loué, l’acquéreur doit assumer l’obligation de délivrance s’imposant, de manière continue, à tout bailleur, et en ne s’acquittant pas des travaux nécessaires, il commet lui aussi un manquement permettant au preneur d’agir en exécution forcée.
C’est une condamnation in solidum qui est alors prononcée à l’encontre des deux propriétaires successifs.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 21 février 2019 n°18-11.553