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Publié le 2 Mai 2011

L’agent immobilier et le mandat

Cet article a pour objet de faire le point sur les conditions de validité du mandat et les conditions de rémunération de l’agent immobilier.

I- LE MANDAT

L’activité de l’agent immobilier, notamment ses relations avec la clientèle, sont régies par la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet et son décret d’application n°72-278 du 20 juillet 1972.

1- La validité du mandat

Le mandat, outil obligatoire pour permettre à l’agent immobilier de toucher sa commission, doit respecter un certain formalisme obligatoire. Tout d’abord il doit être écrit.

En vertu de l’article 92 du décret, doivent être indiqués :

* le numéro et le lieu de délivrance de la carte professionnelle ;

* le nom ou la raison sociale de l’entreprise et l’activité exercée ;

* le nom et l’adresse du garant ;

Ces indications figurent en principe sur le cachet de l’agence.

De plus, à peine de nullité ou de la perte de rémunération :

* Le mandat doit être numéroté et mentionné par ordre chronologique dans un registre des mandats ;

* Le numéro d’ordre est reporté, à peine de nullité, sur l’exemplaire restant en possession du mandant. (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 16 mai 2006 n°03-10229)

* La remise immédiate d’un des exemplaires original du mandat comportant une clause d’exclusivité est exigée. (Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 25 février 2010 n°08-14787)

* En présence d’une clause pénale d’une clause d’exclusivité ou d’une clause ou lorsqu’il comporte une clause aux termes de laquelle une commission sera due par le mandant, même si l’opération est conçue sans les soins de l’intermédiaire (article 78 du décret n°782-678 du 20 juillet 1972)

A quel moment doit-on détenir un mandat ? Préalablement à toute négociation.

Mais à quel moment commence la négociation ? Dès la publicité ? Lorsqu’on fait visiter le bien ?

2- La publicité sans mandat est interdite : (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 3 mai 1979, n° 77-14857) a fortiori la visite ! (Cour de Cassation, Chambre, 1ère Chambre Civile, 2 octobre 2007, 05-18706).

Le mandat doit prévoir le montant de la commission ou son mode de détermination (si par exemple on applique un pourcentage) et l’indication de la partie qui en a la charge. Le compromis doit indiquer le montant de la commission et la partie qui en a la charge. Il doit naturellement y avoir cohérence entre les deux documents. Sinon, pas de droit à commission ! (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 25 mars 2003 n°01-12322)

3- Le mandat doit être limité dans le temps !

Toute période de tacite reconduction indéfinie serait nulle. (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 18 octobre 2005, n°02-16046)

Les effets du mandat se poursuivent au delà de la fin du mandat :

L’interdiction de traiter avec un client présenté par l’agence pendant un certain délai est licite. Ce délai doit être « raisonnable » d’après la commission de recommandation des clauses abusives. Un délai de deux ans a été validé par un arrêt de la cour d’appel de Grenoble, lequel figure d’ailleurs sur le site de cette commission : (CA Grenoble 13/11/00 n°99/00770) et la Cour de Cassation l’a confirmé récemment : (Cour de Cassation, Chambre civile 1, 2 octobre 2007, 06-14238)

4- Mandat en cas de « démarchage », le formalisme là aussi est très strict :

* Présence du coupon d’annulation ;

* Indication de la date de la main du mandant ;

* Présence des mentions obligatoires dont, en particulier, le nom du démarcheur, et, sur le coupon, l’adresse du lieu où il doit être envoyé en cas d’annulation dans les 7 jours.

En cas d’envoi du mandat par la Poste pour signature, il convient d’utiliser un mandat « démarchage ».

La seule possibilité pour obtenir une rémunération sans mandat ou avec un mandat nul est d’avoir rempli la convention postérieure à l’acte authentique. Plusieurs jugements de la Cour de Cassation l’ont confirmé. Ce document « efface » tout vice de forme, tout oubli (Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 3 février 1993 n°90-10103)

Après avoir rappelé l’obligation de détenir un mandat écrit : « Si, par une convention ultérieure, les parties à la vente peuvent s’engager à rémunérer les services de l’agent immobilier, cette convention n’est valable que si elle est postérieure à la vente régulièrement conclue ». Cette position de la Cour de Cassation est constante. (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 25 janvier 2005 n°02-10764)

On peut détenir un mandat du vendeur et un mandat de l’acquéreur pour la même opération : le droit à commission existe alors pour chacun des mandats. (Cour de Cassation, 1ére Chambre Civile, 13 mai 1998n°96-17374).

Par ailleurs, le mandant peut renoncer à l’opération, même pendant la période d’irrévocabilité : (Cour de Cassation, Chambre civile 1, 30 mai 2006, 04-18972)

Dans ce cas pas de commission, mais éventuellement des dommages-intérêts ; surtout si le mandant remet en vente immédiatement.

En vertu du 3ème alinéa de l’art. 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 72 : « Lorsqu’il comporte l’autorisation de s’engager pour une opération déterminée, le mandat en fait expressément mention », l’agent immobilier ne peut engager son mandant dans une opération.

Le mandant pourra toujours refuser de vendre, par exemple, même si le mandataire a trouvé un client au prix du mandat ; dans ce cas il sera redevable de dommages-intérêts du montant de la commission.

Cette mention expresse (manuscrite…) n’est que rarement utilisée, et en tout cas jamais en présence d’un mandat simple, ce serait bien trop dangereux : le bien pourrait être vendu plusieurs fois.

II – L’AGENT IMMOBILIER EVINCE

Deux cas : vente directe entre les parties et « concours » entre agences.

1- Vente directe entre les parties :

La cour de cassation est très claire sur ce point : « lorsqu’un agent immobilier bénéficiaire d’un mandat fait visiter à une personne l’immeuble mis en vente et qu’ensuite le vendeur traite directement avec cette personne, l’opération est réputée effectivement conclue au sens de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970, par l’entremise de cet agent, lequel a alors droit à la commission convenue… » Cette position est constante :

1) Cour de Cassation, Assemblée Plénière, 9 mai 2008 n°07-12449

2) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 14 novembre 2000, n°98-10629

2) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 1994, n°92-14500

3) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 8 juillet 1994, n°92-14346

4) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 17 novembre 1993, n°91-19366

5) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 22 mai 1985 n°84-10572

Comment prouver la visite ? Le bon de visite est incontournable, c’est le moyen de preuve le plus habituel, admis en tant que tel par les tribunaux. Il ne permet pas de se retourner contre l’acquéreur, mais contre le vendeur.

D’autres preuves ou commencement de preuves peuvent se révéler utiles, agenda, relevé téléphonique à 10 chiffres, témoignages…

2- « Concours » entre agences :

Une agence fait visiter, une autre conclut l’opération.

La commission n’est due qu¹à l’agence qui a conclu l’opération (fait signer l’engagement des parties) mais des dommages intérêts d’un montant égal à la commission sont dus à l’agence ayant présenté le bien en premier, sous réserve que le mandat le prévoie !

La commission est due à l’agence qui a vendu :

1) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 16 mai 2006, n°04-20477

2) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 15 février 2000, n°97-19429

3) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 22 juillet 1986, n°85-11928

4) Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 16 octobre 1984, n°82-12823

Dommages-intérêts :

L’agence qui a fait visiter en premier a droit à des dommages-intérêts, en prouvant une faute du mandant qui, par un abus de sa part, et compte tenu des diligences accomplies, l’aurait privée de la réalisation de la vente. Faute du mandant : ne pas respecter l’interdiction contractuelle de traiter par l’intermédiaire d’un autre mandataire avec un client présenté par l’agence. Cette interdiction contractuelle figure bien évidemment dans tous nos mandats.

Voici des exemples de faute du mandant :

Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 30 mai 2006, n°04-11208

Cour de Cassation, 1ère Chambre civile, 13 décembre 2005, n°03-17695

Si l’agence n’a pas droit à sa commission par suite de la faute d’une des parties, tout n’est pas perdu, elle peut obtenir des dommages-intérêts sur le fondement des dispositions des articles 1142 et 1152 du Code civil.

Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 2 octobre 2007, n°06-14238

Document joint : LAGENTIMMOBILIERETLEMANDATmai2011.pdf

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