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Publié le 12 Mai 2024

Bail Commercial : Procédures collectives et Garantie autonome bancaire à première demande

Dès lors que le bailleur a actionné la garantie autonome bancaire à première demande et qu’il en a demandé la reconstitution avant l’ouverture d’une procédure collective, cela constitue une demande de paiement qui doit être déclaré irrecevable comme ne pouvant pas être réclamée postérieurement au jour d’ouverture de ladite procédure collective.

Pour mémoire, aux termes de l’article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d’ouverture (d’une procédure de sauvegarde) interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article L 621-7 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent (ou) à la résolution du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

L’article L. 622-22 du même code dispose que sous réserve des dispositions de l’article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de créance : elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur … dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

Enfin, l’article L. 631-14 précise que les articles L. 622-3 à L. 622-9, à l’exception des articles L. 622-6-1, et L. 622-13 à L 622-33, sont applicables à la procédure de redressement judiciaire.

L’instance en cours visée par l’article L 622-22, précité, est celle qui tend à obtenir de la juridiction saisie du principal une décision définitive sur l’existence et le montant de cette créance, de sorte que la créance faisant l’objet d’une instance en référé, qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle, présentant un caractère provisoire (et qui ne peut donc être fixée au passif), doit être soumise à la procédure de vérification des créances et à la décision du juge-commissaire. L’ouverture de la procédure collective pendant cette instance rend donc irrecevable, dans ce cadre procédural, la demande tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent et/ou à la résolution du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

En l’espèce, nonobstant une procédure en fixation du loyer du bail renouvelé, et de multiples procédures de recouvrement des loyers par la suite, la société PGF a fait preuve de carence dans le règlement des loyers 2020/2021.

Les consorts [W] ont, le 24 septembre 2021, appelé le montant maximal de la garantie autonome à première demande (GAPD) souscrite par la société PGF auprès de la Caisse Fédérale de Crédit Mutuel, soit la somme de 340 123, 26 euros.

Le 26 septembre 2022, les consorts [W], bailleurs, ont fait délivrer à la société PGF un commandement, visant la clause résolutoire du bail, de reconstituer la garantie autonome à première demande. Ils ont obtenu une condamnation en référé et la société PGF a interjeté appel de la décision.

Par jugement en date du 20 septembre 2023, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la SA PGF.

Saisie du dossier, la Cour dappel d’Aix-En-Provence a considéré que la reconstitution d’une garantie autonome à première demande (GAPD) d’un montant de 385 909,60 euros, tel que mentionné dans le commandement visant la clause résolutoire du 26 septembre 2022, s’assimile, au sens des dispositions de l’article L 622-22 précité du code de commerce, à un paiement de somme dès lors :

– qu’elle implique un décaissement ou un emprunt et a donc un impact dans la trésorerie et/ou les comptes d’exploitation de l’entreprise obérant ainsi toute tentative de redressement : elle est donc contraire, s’agissant d’une obligation née antérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, à la lettre, l’esprit et aux finalités de celle-ci ;

– qu’elle est susceptible d’être appréhendée par la seule bailleresse rompant ainsi l’égalité entre créanciers par rapport aux dettes et/ou obligations nées avant l’ouverture de la procédure collective : il n’est, à cet égard, pas contesté que l’obligation de reconstituer la GAPD a été générée par la mobilisation de celle-ci, dans les suites de l’ordonnance du président de commerce d'[Localité 4] en date du 29 novembre 2021.

En conséquence, la demande de reconstitution de la GAPD doit être déclarée irrecevable.

Cour d’appel, Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 18 Avril 2024 n° 23/06144

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