En matière de bail commercial, la persistance du manquement du bailleur à son obligation de délivrance, ici une réduction de surface persistante de 30,74 ares, constitue un fait permettant au locataire d’exercer l’action en résiliation du bail commercial sans qu’aucun délai de prescription ne puisse lui être opposé.
1. Textes juridiques
Aux termes de l’article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Aux termes de l’article 1709 du Code civil, le louage des choses est un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer.
Selon l’article 1719 du Code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et de lui en assurer la jouissance paisible pendant la durée du bail .
Ces obligations continues du bailleur sont exigibles pendant toute la durée du bail , de sorte que la persistance du manquement du bailleur à celles-ci constitue un fait permettant au locataire d’exercer l’action en résiliation du bail.
2. Faits de l’affaire
La société Paul Saenger et fils et la société civile immobilière Saenger, aux droits desquelles est venue la société civile immobilière du Bois d’Audrey et Delphine (la SCI), ont donné à bail commercial à la société Saenger, devenue la société Eco bois (la locataire), un terrain, des hangars et des bureaux à usage d’exploitation forestière, négoce de bois d’œuvre et scierie.
Soutenant que la SCI avait amputé d’un tiers l’assiette du bail en y construisant un hangar et un parking loués à un tiers et empêché l’accès aux bâtiments loués, la locataire l’a assignée en résiliation du bail et en indemnisation.
3. Solution de la Cour de Cassation
Pour déclarer l’action en résiliation partiellement prescrite, l’arrêt retient que le délai de prescription de l’action en résiliation fondée sur le manquement du bailleur à son obligation de délivrance ou de jouissance paisible court à compter du jour de la connaissance de la réduction de la surface louée et de la difficulté à accéder au hangar loué.
En statuant ainsi, alors que la réduction de l’assiette du bien loué persistait, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 10 Juillet 2025 n° 23-20.491