S’agissant de la dette résultant d’un bail commercial et dans le cadre d’un redressement judiciaire, si le mandataire conteste le montant des créances antérieures déclarées par le bailleur alors ce dernier dispose d’un délai de trente jours pour faire valoir ses observations. A défaut, la demande du bailleur sera irrecevable et sa créance sera retenue pour le montant non contesté par le mandataire.
Pour mémoire, les étapes de la procédure qui déterminent le sort des créances antérieures du bailleur peuvent être chronologiquement ainsi décrites :
- Dans les huit jours du jugement d’ouverture, le débiteur remet la liste de ses créanciers à l’administrateur et au mandataire judiciaire (articles L. 622-6, al. 2 . et R. 622-5. du Code de Commerce). La liste permettra de présumer la déclaration des créances ainsi inscrites (article L. 622-24, al. 3).
- Dans les quinze jours du jugement d’ouverture, le mandataire judiciaire avertit les créanciers connus d’avoir à lui déclarer leurs créances (article R. 622-21, al. 1er du Code de Commerce), en les informant du contenu de l’information dont il dispose (V) ;
- Dans les 2 mois à compter de la publication du jugement d’ouverture : déclaration des créances (article R. 622-24du Code de Commerce).
- Dans les trente jours de la mise en demeure du débiteur par le mandataire judiciaire, le débiteur doit faire ses observations (articles L. 624-1, al. 2 et R. 624-1, al. 3. du Code de Commerce) ;
- Dans les trente jours à compter de la réception de la lettre avisant le créancier de la contestation , ce dernier doit répondre (articles L. 622-27 et R. 624-2, al. 2 . du Code de Commerce)) ;
- Dans un délai fixé par le tribunal : vérification des créances par le mandataire judiciaire qui établit la liste des créances qu’il dépose au greffe (article R. 624-2du Code de Commerce) ;
- Sans délai précisé, les parties à l’instance en contestation de créance sont convoquées (article R. 624-4du Code de Commerce) : si le créancier a répondu, le greffe convoque le créancier, débiteur, mandataire judiciaire ou liquidateur, administrateur ; si le créancier n’a pas répondu, il n’est pas convoqué (article R. 624-4du Code de Commerce) ;
- Le juge-commissaire rend sa décision (article L. 624-2du Code de Commerce) :
- Admission ou rejet ;
- Déclaration d’incompétence ou constatation de contestation sérieuse : délai d’un mois pour la partie demanderesse pour saisir le juge compétent, à peine de forclusion (article R. 624-5 du Code de Commerce) ;
- Constatation d’une instance en cours ;
- État des créances déposé au greffe et publié au BODACC (article L. 624-3-1 du Code de Commerce créé par ord. 2008-1345.)
Ainsi, en application de l’article L. 622-27 du Code de commerce, s’il y a discussion sur tout ou partie d’une créance autre que celles mentionnées à l’article L. 625-1, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l’invitant à faire connaître ses explications.
Le défaut de réponse dans le délai de trente jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire, à moins que la discussion ne porte sur la régularité de la déclaration de créances.
En l’espèce, le bailleur a déclaré une créance de 15 329 euros.
Le mandataire judiciaire a contesté la créance à hauteur de 3600 euros, montant du dépôt de garantie versé par la société débitrice lors de l’entrée en jouissance.
Le courrier du mandataire judiciaire exprime clairement une discussion sur le montant de la créance de la bailleresse.
Nonobstant le caractère bien-fondé ou non de cette discussion, la SCI bailleresse a été informée de manière suffisamment précise de l’objet de la contestation, de la proposition envisagée du mandataire judiciaire et de la sanction attachée à la non-réponse de sa part dans le délai de trente jours imparti, par la reprise des dispositions de l’article L. 622-27 du Code de commerce dans le courrier d’information.
Il incombait à la SCI de faire valoir ses observations auprès du mandataire judiciaire, au plus tard dans les trente jours à compter de la réception du courrier d’information.
N’ayant pas usé de cette possibilité que lui ouvrait la loi, la SCI n’est plus recevable à contester la proposition du mandataire judiciaire, entérinée par le juge-commissaire dans son ordonnance. Etant forclose en sa contestation, elle n’est pas davantage recevable à contester devant la cour d’appel l’ordonnance du juge-commissaire ayant repris la proposition du mandataire judiciaire.
Cour d’appel, Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 19 Juin 2025 n° 20/11586