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Publié le 5 Jan 2020

Usufruit et débiteur de l’indemnité d’éviction

L’usufruitier est le seul redevable de l’indemnité d’éviction due en application de l’article L. 145-14 du code de commerce, qui a pour objet de compenser le préjudice causé au preneur par le défaut de renouvellement du bail.

En l’espèce, le 5 mars 2004, Mme B. veuve M., usufruitière, et Mme F., nue-propriétaire, d’un immeuble à usage commercial, ont délivré à M. et Mme G., preneurs, un refus de renouvellement du bail sans indemnité d’éviction, lequel, par arrêt du 20 février 2008, a été déclaré sans motif grave et légitime.

Pour condamner in solidum Mmes B. veuve M. et F. à payer l’indemnité d’éviction due aux preneurs, l’arrêt retient que Mme M. et Mme F., laquelle a la qualité de bailleur, ayant, ensemble, fait délivrer un refus de renouvellement, sont toutes les deux redevables de l’indemnité d’éviction dès lors que l’acte de refus de renouvellement excède les pouvoirs du seul usufruitier.

Or, en cas de démembrement de propriété, l’usufruitier, qui a la jouissance du bien, ne peut, en application de l’article 595, dernier alinéa, du code civil, consentir un bail commercial ou le renouveler sans le concours du nu-propriétaire (3e Civ., 24 mars 1999, pourvoi n° 97-16.856, Bull. 1999, III, n° 78) ou, à défaut d’accord de ce dernier, qu’avec une autorisation judiciaire, en raison du droit au renouvellement du bail dont bénéficie le preneur même après l’extinction de l’usufruit.

En revanche, l’usufruitier a le pouvoir de mettre fin au bail commercial et, par suite, de notifier au preneur, sans le concours du nu-propriétaire, un congé avec refus de renouvellement (3e Civ., 29 janvier 1974, pourvoi n° 72-13.968, Bull. 1974, III, n° 48) ;

Ainsi, l’usufruitier, ayant seul, la qualité de bailleur dont il assume toutes les obligations à l’égard du preneur, l’indemnité d’éviction due en application de l’article L. 145-14 du code de commerce, qui a pour objet de compenser le préjudice causé au preneur par le défaut de renouvellement du bail, est à sa charge.

Il en résulte qu’en condamnant la nue-propriétaire, in solidum avec l’usufruitière, alors que l’indemnité d’éviction n’était due que par l’usufruitière, la cour d’appel a violé les articles 595 alinéa 4 du Code Civil et l’article L 145-14 du Code de Commerce.

Cour de cassation, 3e chambre civile, 19 Décembre 2019 n° 18-26.162

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