Le délai de prescription d’une action en responsabilité contre un agent immobilier ne commence à courir qu’à partir du moment où l’acquéreur connaît — ou aurait dû connaître — le dommage, le fait générateur et le lien de causalité entre les deux.
1. Textes légaux applicables
L’article 2224 du Code civil dispose :
« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »
Il en résulte que le délai de prescription en matière de responsabilité civile court à compter du moment où la victime connaît ou aurait dû connaître :
- l’existence du dommage ;
- le fait générateur de ce dommage ;
- et le lien de causalité entre les deux.
Ce texte fonde une jurisprudence constante en matière de responsabilité des intermédiaires immobiliers, notamment pour défaut d’information ou de conseil.
2. Jurisprudences applicables
Le principe du point de départ du délai de prescription a été précisé par la Cour de cassation :
- Le délai court à compter du moment où la victime a connaissance du dommage, du fait générateur et du lien causal (Cass., Ch. mixte, 19 juillet 2024, n° 22-18.729 et 20-23.527).
S’agissant de la responsabilité de l’agent immobilier, plusieurs décisions illustrent ses obligations :
- Manquement à l’obligation d’information lorsqu’il omet de signaler des désordres visibles affectant le bien vendu (Cass. 3e civ., 21 décembre 2023, n° 22-20.045).
- Faute professionnelle pour ne pas avoir vérifié les informations transmises par le vendeur avant la vente, ce qui constitue un manquement à son devoir de diligence et de loyauté (Cass. 3e civ., 14 décembre 2017, n° 16-24.170).
Ces décisions réaffirment la position constante selon laquelle l’agent immobilier ne peut se limiter à un rôle d’intermédiaire passif : il doit exercer une vigilance active et fournir à l’acquéreur une information complète, claire et vérifiée.
3. Analyse des faits
En 2014, des acquéreurs ont acheté un chalet à usage d’habitation par l’intermédiaire d’un agent immobilier mandaté par le vendeur.
Peu de temps après l’achat, ils ont constaté des problèmes d’isolation thermique et ont fait établir, le 25 janvier 2018, un diagnostic thermique confirmant ces défauts.
Sur cette base, ils ont sollicité en référé la désignation d’un expert judiciaire, puis ont assigné l’agent immobilier en réparation de leurs préjudices.
La cour d’appel a déclaré leur action prescrite, considérant qu’ils connaissaient les désordres dès l’hiver 2014/2015.
La Cour de cassation a censuré cette décision au motif que les juges du fond auraient dû rechercher la date à laquelle les acquéreurs avaient eu connaissance du caractère erroné du diagnostic de performance énergétique (DPE) fourni par l’agent immobilier. C’est ce diagnostic erroné — et non les simples désordres apparents — qui constituait le fait générateur du manquement reproché à ce dernier.
Ainsi, le délai de prescription ne commence à courir qu’à la date de découverte du manquement imputable à l’agent immobilier, et non à celle de la simple apparition des désordres matériels.
4. Conclusion
Le point de départ du délai de prescription ne se situe pas à la date du dommage apparent, mais à celle où l’acquéreur découvre le manquement fautif de l’agent immobilier à son obligation d’information et de conseil.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 25 septembre 2025 – n° 24-12.596
FAQ
Quand commence la prescription contre un agent immobilier ?
Le délai de cinq ans court à partir du moment où l’acquéreur connaît le dommage, le manquement et son auteur — pas dès la première manifestation du désordre.
L’agent immobilier est-il responsable d’un diagnostic erroné ?
Oui, s’il le transmet sans vérification ni réserve, il engage sa responsabilité pour défaut d’information et de conseil.
Le simple constat d’un désordre suffit-il à déclencher la prescription ?
Non. Ce n’est qu’à la découverte du lien entre le désordre et la faute de l’agent immobilier que la prescription commence à courir.