Le délai de prescription de la demande du locataire commercial en paiement des constructions édifiées par lui sur le terrain loué ne court qu’à compter du transfert de propriété que la clause d’accession du bail fixait à la fin des relations contractuelles.
Le propriétaire d’un terrain loué pour l’exploitation d’un garage, en vertu d’un bail commercial renouvelé plusieurs fois, donne congé au locataire.
Celui-ci demande le paiement d’une indemnité d’éviction incluant le coût des constructions qu’il a édifiées sur le terrain.
Il se prévaut de la clause d’accession suivante, inscrite dans le bail d’origine : « Les constructions élevées pendant le cours dudit bail appartiendront à l’expiration de celui-ci au [bailleur] à charge pour celui-ci d’en payer la valeur aux locataires au moment de l’expiration du bail et ce, après expertise établie contradictoirement par les architectes des parties en cause. »
Le propriétaire lui oppose la prescription de la demande introduite plus de 30 ans après le premier renouvellement du bail, date à laquelle il estime être devenu propriétaire des constructions par le jeu de l’accession.
La cour d’appel de Versailles juge au contraire que la demande n’est pas prescrite.
Il ressort nécessairement de la clause d’accession que le transfert de propriété était conditionné par le paiement par le bailleur de la valeur des constructions édifiées par le locataire ; faute d’expertise contradictoire à l’expiration du bail commercial, les parties ont d’un commun accord entendu différer le paiement des constructions à la fin de leurs relations contractuelles.
Celles-ci ayant été constamment renouvelées, le locataire ne pouvait pas en demander l’indemnisation avant que le propriétaire ne lui donne congé.
En application de l’article 555 du Code Civil, le propriétaire du fonds loué sur lequel le locataire a édifié des constructions peut soit en demander la destruction, soit en conserver la propriété, moyennant le remboursement de certaines sommes.
En l’absence de précision dans le Code civil, la jurisprudence considère que le transfert de propriété des constructions au profit du bailleur, qui fait naître le droit à indemnité du locataire constructeur, s’effectue à la date d’expiration du bail initial (Cass. 3e civ. 27 janvier1999 no 97-11.797).
Les parties peuvent déroger à ces règles qui ne sont pas d’ordre public et reporter l’accession en fin de jouissance ou en fin de chaque bail.
La cour d’appel de Versailles a ainsi considéré que faute de transfert de propriété des constructions avant la fin des relations contractuelles des parties, la créance de prix du locataire n’était pas née, de sorte que le délai de prescription de l’action n’avait pas pu commencer à courir.
Cour d’appel de Versailles, 12e chambre section 2, 27 février 2018 n°16/06319