La perte d’emploi (au sens de l’article 15 de la loi du 6 juillet 1989) ouvre droit à un préavis réduit d’un mois. Mais encore faut-il que le congé soit notifié dans un délai suffisamment proche de l’événement. Un congé donné plus de deux mois et demi après la fin d’un contrat à durée déterminée est jugé tardif : le préavis de trois mois s’applique.
1/ Textes et fondements légaux
L’article 15, I, alinéa 2, de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, modifiée notamment par la loi ALUR du 24 mars 2014, prévoit que :
« Le délai de préavis applicable au congé est de trois mois. Toutefois, il est réduit à un mois lorsque le congé est motivé par:
(…) 2° La perte d’emploi (…)
Le locataire qui entend bénéficier de ces délais réduits précise le motif invoqué et le justifie au moment de l’envoi de la lettre de congé. »
En d’autre termes, l’article 15 I permet au locataire de bénéficier d’un délai réduit de préavis à un mois, notamment en cas de perte d’emploi. Pour cela, deux conditions cumulatives doivent être respectées :
- Le motif doit être mentionné dans la lettre de congé.
- Le locataire doit justifier de la perte d’emploi en produisant un document probant.
La difficulté réside dans la définition et le champ de la perte d’emploi ainsi que dans le lien de causalité entre la perte d’emploi et la délivrance du congé.
2/ Jurisprudences applicables
- Cass. 3e civ., 3 déc. 2003, n° 02-14.411 : la rupture d’une promesse d’embauche ne constitue pas une perte d’emploi.
- CA Paris, 30 oct. 1997, n° 96/80572 : la démission ne permet pas de bénéficier du préavis réduit.
- Cass. 3e civ., 8 déc. 1999, n° 98-10.206 et 8 juill. 2009, n° 08-14.903 : la fin d’un CDD équivaut à une perte d’emploi.
- Cass. 3e civ., 9 juin 2016, n° 15-15.175 : la rupture conventionnelle est assimilée à une perte d’emploi.
- Cass. 3e civ., 5 févr. 2014, n° 13-10.804 et CA Pau, 3 nov. 2020, n° 19/00956 : certaines juridictions ont admis le préavis réduit malgré un délai de 2 à 3 mois entre la fin du contrat et le congé.
- CA Poitiers, 20 mai 2025, n° 24/00631 : confirme la sévérité de l’appréciation : un congé délivré 2 mois et demi après la fin du CDD est jugé tardif.
La notion de perte d’emploi a été précisée par les tribunaux. Elle ne recouvre pas les hypothèses de démission ou de rupture volontaire (CA Paris, 30 oct. 1997, n° 96/80572), ni la rupture d’une promesse d’embauche (Cass. 3e civ., 3 déc. 2003, n° 02-14.411).
En revanche, la jurisprudence assimile à une perte d’emploi :
- la fin d’un contrat à durée déterminée (Cass. 3e civ., 8 déc. 1999, n° 98-10.206 ; Cass. 3e civ., 8 juill. 2009, n° 08-14.903),
- la rupture conventionnelle (Cass. 3e civ., 9 juin 2016, n° 15-15.175).
Elle exige en outre un lien de causalité entre la perte d’emploi et la délivrance du congé : le préavis réduit n’est admis que si le congé intervient dans un délai rapproché. Certaines décisions admettent un laps de temps de deux à trois mois (Cass. 3e civ., 5 févr. 2014, n° 13-10.804 ; CA Pau, 3 nov. 2020, n° 19/00956), mais la tendance reste à une appréciation stricte.
3/ Analyse de l’arrêt
En l’espèce, la locataire avait indiqué dans son congé que son CDD avait pris fin le 31 décembre 2019. Mais ce congé n’a été notifié que le 19 mars 2020, soit près de trois mois plus tard.
La Cour d’appel a jugé que :
- La fin d’un CDD est bien une perte d’emploi au sens de la loi.
- Le document produit (contrat de travail mentionnant la date de fin) constituait une preuve suffisante.
- Toutefois, le lien de causalité entre la perte d’emploi et le congé faisait défaut : le délai écoulé montrait que le motif réel était autre.
En conséquence, le préavis réduit d’un mois a été refusé et le préavis légal de trois mois est resté applicable.
Cour d’appel, Poitiers, 2e chambre, 20 Mai 2025 n° 24/00631
Conclusion
La perte d’emploi ouvre droit à un préavis réduit, mais le locataire doit agir sans tarder. Un congé délivré trop longtemps après la rupture du contrat sera requalifié en congé avec préavis de trois mois.
En bref
Le préavis réduit d’un mois pour perte d’emploi suppose que le congé soit notifié rapidement. Un délai de 2 mois et demi après la fin d’un CDD est jugé tardif (CA Poitiers, 20 mai 2025).
FAQ
➡️ La fin d’un CDD est-elle une perte d’emploi ?
Oui, la jurisprudence l’admet.
➡️ Peut-on notifier le congé plusieurs mois après la perte d’emploi ?
Non, le délai doit être rapproché. Un congé tardif prive du bénéfice du préavis réduit.
➡️ Les tribunaux sont-ils toujours stricts ?
Non, l’appréciation est casuistique. Certaines décisions tolèrent un délai de 2 à 3 mois.