Lorsque suite à la fin d’un bail à construction, et en présence d’un pacte de préférence pour un bail commercial pour le preneur, le bailleur choisit de donner le terrain à un usage différent (ici, un nouveau bail à construction), une clause de préférence en faveur du preneur n’est pas opposable. Ce dernier doit démolir les constructions et devient occupant sans droit ni titre.
1. Textes légaux et jurisprudence
Pour mémoire, constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s’engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d’entretien pendant toute la durée du bail (article L. 251-1 du Code de la construction et de l’habitation).
Il est conclu pour une durée comprise entre dix-huit et quatre-vingt-dix-neuf ans. Il ne peut se prolonger par tacite reconduction.
Ce bail confère un droit réel cessible et susceptible d’être hypothéqué à un preneur qui s’engage à construire et à entretenir le bien.
En vertu de l’article L. 251-3 du Code de la construction et de l’habitation, les parties conviennent de leurs droits respectifs de propriété sur les constructions existantes et sur les constructions édifiées.
En pratique, trois situations se rencontrent donc principalement :
- retour des constructions avec ou sans indemnité au bailleur ;
- maintien des constructions et vente du terrain au preneur ;
- remise au bailleur du terrain nu et libre : une telle possibilité, bien qu’elle ne soit pas prévue par la loi, est considérée par la jurisprudence comme compatible avec la qualification de bail à construction (Cass. 3e civ., 30 janv. 2008, n° 06-21.292).
2; Faits de l’affaire
La qualification du bail liant les parties n’est plus contestée par la société preneuse.
Il est constant que la remise du terrain libre au bailleur en fin de bail à construction est compatible avec la qualification de bail à construction (Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 30 janvier 2008 n° 06-21.292)
Un bail à construction, conclu pour 20 ans, est venu à expiration.
Le contrat contient une clause prévoyant un droit de préférence pour un bail commercial.
Plus précisément, à l’issue du bail, le bailleur s’engage à accorder préférentiellement au preneur, lorsque ce dernier aura, à l’expiration du bail par arrivée du terme ou résiliation amiable, perdu la propriété des nouvelles constructions par suite du droit d’accession du bailleur, un contrat de location portant sur la totalité de l’ensemble immobilier, terrain et bâtiments, et ce, à loyer égal et par préférence à tout autre.
Ce contrat de location constituera un bail soumis au statut des baux commerciaux.
3. Solution
En application de l’article 1162 ancien du Code civil, cette clause doit s’interpréter en faveur de celui qui a contracté l’obligation et donc en faveur du bailleur.
Le pacte de préférence ne s’applique que si le bailleur entend maintenir l’exploitation existante.
Dans la mesure où le bailleur a décidé de donner le terrain à bail à construction pour un autre usage, il n’est pas tenu par le pacte de préférence et il est en droit d’exiger la démolition des bâtiments construits par le preneur actuel.
Ce dernier est donc occupant sans droit ni titre et doit démolir les constructions.
Cour d’appel, Lyon, 1re chambre civile A, 3 Juillet 2025 n° 21/06429