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Publié le 27 Avr 2025

Crédit-bail immobilier : Indemnité d’occupation manifestement excessive

La clause d’un contrat de crédit-bail qui fixe, à l’avance et de manière forfaitaire, une indemnité à la charge du crédit-preneur en cas de maintien dans les lieux après résiliation, peut présenter le caractère d’une clause pénale et être réduite par le juge si elle apparaît manifestement excessive.


1. Rappel des textes et de la jurisprudence

Conformément à l’article 1152 du Code civil (dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016), le juge peut réduire l’indemnité d’occupation si elle apparaît manifestement excessive, notamment lorsqu’elle est sans rapport avec le loyer prévu au contrat.

La jurisprudence considère que:

  • Une indemnité d’occupation peut être qualifiée de clause pénale si elle excède de manière manifeste le loyer initial (Cass. 3e civ., 8 avr. 2010, n° 08-20.525)
  • Admet qu’une indemnité d’occupation égale au double du loyer présente les caractères d’une clause pénale (Cass. 3e civ., 8 avr. 2010, n° 08-20.525 ; CA Caen, 31 oct. 2019, n° 18/00444).

Attention : en matière de baux d’habitation, les clauses pénales sont interdites par l’article 4, i de la loi du 6 juillet 1989.


2. Rappel des faits

La société Crédit Mutuel Real Estate Lease (le crédit-bailleur) a conclu, le 8 juillet 2011, un contrat de crédit-bail immobilier avec la société SCI Saint-Etienne-du-Rouvray (le crédit-preneur), portant sur un immeuble commercial et un parking.

Après des loyers impayés, le bailleur a actionné la clause résolutoire et a demandé :

  • Constat de la résiliation
  • Expulsion du crédit-preneur
  • Paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle fixée à 1,5 % du montant de l’investissement hors taxes

Le crédit-preneur a contesté cette indemnité, sollicitant sa modération.


3. Analyse de la Cour de cassation

La Cour d’appel avait rejeté la demande de modération, considérant que l’indemnité d’occupation ne pouvait pas être assimilée à une clause pénale.

La Cour de cassation casse cette décision :

Elle rappelle que la qualification de clause pénale s’impose si l’indemnité est manifestement sans rapport avec le loyer initial.

Les juges auraient donc dû vérifier si le montant prévu (1,5 % du coût d’investissement) était proportionné au loyer fixé par le contrat.

4. Portée pratique de la décision

Les clauses d’indemnité d’occupation dans les contrats de crédit-bail doivent être proportionnées.
Le crédit-preneur peut solliciter la réduction judiciaire d’une indemnité excessive.
Le crédit-bailleur doit sécuriser la rédaction de ses clauses d’indemnités pour éviter tout risque de requalification.


Cour de cassation, 3e chambre civile, 16 janvier 2025, n° 23-15.256

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