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Publié le 14 Mar 2021

Loyers Covid – Perte partielle de la chose louée ?

Statuant en référé, la Cour d’appel de Versailles a considéré que la perte partielle de la chose louée constitue une contestation sérieuse s’opposant au paiement des loyers et charges pendant les périodes de fermeture administrative.

Selon la Cour d’appel de Versailles, en application de l’article 1722 du code civil, si pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander une diminution du prix.

De son point de vue, il est constant que même s’il n’y a pas destruction physique du bien objet du bail, il y a juridiquement perte lorsque le locataire ne peut plus jouir de la chose louée ou ne peut plus en user conformément à sa destination.

En l’espèce, selon les stipulations du bail commercial du 17 avril 2014, les biens loués sont destinés exclusivement aux activités de :

‘*vente de robes de mariées, de soirée, de cocktail, toutes tenues de cérémonie et tous modèles de couture ou prêt à porter, textile ou vêtement,

*négoce de tous articles de mode se rapportant à la personne : ceintures, sacs, bijouterie fantaisie, montres, cadeaux accessoires, gadgets cosmétiques et toutes branches annexes,

*toutes prestations de service se rapportant aux cérémonies nuptiales, civiles et religieuses,

*et généralement toutes opérations quelconques pouvant se rattacher directement ou indirectement à l’objet ci-dessus défini, pourvu que ces opérations ne modifient pas le caractère civil de la société preneuse’.

Ainsi, il en résulte que les locaux loués ont été soumis à l’interdiction d’ouverture puis à l’interdiction pour la population de se déplacer.

Il est ainsi établi que durant la période concernée, la société A. n’a pu ni jouir de la chose louée, ni en user conformément à sa destination.

Dans ces conditions, l’allégation par le locataire de la perte partielle des locaux loués en application des dispositions de l’article 1722 du code civil revêt le caractère d’une contestation sérieuse opposable à son obligation de payer le loyer et les charges pendant la période de fermeture contrainte du commerce.

Le montant des loyers sur la période allant du 16 mars au 10 mai 2020 évalué à la somme de 12 008,59 euros, présenté aux termes de calculs précis dans ses conclusions par la société A. n’est pas contesté en tant que tel par le bailleur.

La Cour d’appel de Versailles indique donc qu’il n’y a pas lieu à référé sur la demande provisionnelle de paiement des loyers concernant cette période et l’ordonnance critiquée sera infirmée sur ce point.

Cette décision:

  • abonde dans le sens d’autres décisions retenues par le Juge de l’Exécution du Tribunal Judiciaire de Paris le 27 octobre 2020 (RG n°20/81460) et du 20 janvier 2021 (RG n°20/80923),
  • mais à l’encontre d’une décision rendue sur le fond par le Tribunal de Commerce de Paris le 11 décembre 2020 (RG n°2020035120), et d’autres décisions du Tribunal Judiciaire d’Angers 24 décembre 2020 (RG n°20/00527) et du Tribunal Judiciaire de Strasbourg 19 février 2021 (RG n°20/00552).

Attention, il ne s’agit pas d’une décision statuant sur le fond de l’analyse juridique. En effet, les partie devront soit trouver un accord amiable soit saisir le Tribunal Judiciaire au fond pour faire trancher cette question.

Cour d’appel de Versailles, 14e chambre, 4 mars 2021, n° 20/02572

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