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Publié le 18 Mar 2010

Obstacle à la vente forcée : le bail à vie

Lorsque le bail prévoit que le locataire sera maintenu dans les lieux sa vie durant, le bailleur ne peut délivrer congé avant l’arrivée de ce terme.

En application de l’article 10 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, la durée minimale d’un bail d’habitation est fixée, soit à trois ans (lorsque le bailleur est une personne physique), soit à six ans (propriétaire personne morale).

En 1996, un locataire s’était vu octroyer un contrat de location prévoyant son maintien dans les lieux sa vie durant. Cette stipulation n’a cependant pas découragé l’adjudicataire du bien, qui lui a délivré un congé-reprise. Congé qui, à la surprise générale, a été validé par le juge du fond (Rennes, 15 mai 2008), au motif que la stipulation litigieuse n’avait d’autre effet que de fixer la durée du bail et ne pouvait faire obstacle à l’application des dispositions d’ordre public de l’article 15 de la loi de 1989, selon lesquelles le congé donné par le bailleur peut être justifié par sa décision de reprendre le logement.

Si le raisonnement pouvait paraitre cohérent au départ, il est rapidement ressorti un aveuglément partiel de la Cour d’appel.

En effet, la combinaison des articles 10 et 15 de la loi de 1989 permet de délivrer congé pour certains motifs (reprise pour habiter, pour vendre, pour motifs légitimes et sérieux). Or, ce congé, et il convient de le rappeler, ne produit d’effet que pour le terme du bail. En d’autres termes et en l’espèce pour la fin de vie du locataire.

La Cour de cassation ne s’y est pas trompé et a censuré les juges du fond : « le bail étant conclu pour une durée dont le terme était fixé par un événement certain, les bailleurs ne pouvaient délivrer congé avant ce terme« .

La rectitude du raisonnement juridique commande de préciser que l’irrégularité du congé ne venait pas tant de sa délivrance avant le terme prévu (un congé prématuré n’est pas nul, il voit simplement ses effets reportés à la date à laquelle il aurait dû être donné, V. Civ. 3e, 17 mai 2005, Administrer févr. 2006. 35, obs. Canu ; 13 juin 2006, AJDI 2006. 743 ; V. encore, Civ. 3e, 10 janv. 2007, Bull. civ. III, n° 1 ; D. 2007. AJ 298, obs. Rouquet ; AJDI 2007. 480, note Zalewski), que de la date pour laquelle le bailleur entendait s’en prévaloir (en cours de bail).

En conclusion, ce type de bail est un obstacle pour l’adjudicataire qui souhaite récupérer son bien d’autant que suite au décès du locataire la loi prévoit le transfert du bail au profit de plusieurs catégories de personnes (conjoint survivant, pacsé du défunt, concubin notoire, ascendants et descendants.

Cour de Cassation, 3ème Chambre civile, 10 mars 2010 n° 09-12135

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