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Publié le 29 Mar 2020

Substitution factuelle de la maison mère

La société-mère qui créé une apparence trompeuse propre à permettre au bailleur de croire légitimement qu’elle s’était substituée à sa filiale dans l’exécution du bail doit en supporter les conséquences.

En l’espèce, après la conclusion d’un bail commercial qui devait s’achever le 11 janvier 2018, les parties sont convenues, le 18 janvier 2012, d’une résiliation anticipée du bail, sans indemnité à la charge du preneur, en vertu duquel celui-ci pouvait quitter les locaux loués avant le 30 juin 2012.

A cette date, le bailleur a loué les locaux à une société du groupe auquel appartient la société locataire sortante, pour une durée de deux mois.

Le bailleur a assigné, le 29 juillet 2013, la société locataire sortante, la nouvelle société locataire et la société mère en nullité de l’acte de résiliation anticipée et en indemnisation de ses préjudices.

Ayant relevé que l’accord conclu le 18 janvier 2012, emportant renonciation du bailleur à percevoir des loyers entre le 30 juin 2012 et le 11 janvier 2018, visait expressément l’article 2044 du Code civil, déclarait mettre fin à tout litige né ou à naître ayant pour objet le bail et stipulait avoir autorité de la chose jugée, conformément à l’article 2052 du Code civil, la cour d’appel, a pu en déduire que cet acte constituait une transaction qui, en l’absence de concessions réciproques, devait être annulée, justifiant ainsi légalement sa décision.

Cependant, ayant relevé que, si la société mère ne s’était pas immiscée dans la conclusion et l’exécution du contrat de bail jusqu’en septembre 2011, elle était intervenue, au-delà de la convention d’assistance intra-groupe, à plusieurs reprises, après le non-paiement de loyers par la locataire, pour proposer des solutions de règlement amiable comme :

  • la vente de l’immeuble libre de toute occupation,
  • ou une baisse significative du loyer,
  • que son dirigeant avait indiqué qu’il allait intervenir personnellement auprès des services comptables afin de faire procéder au règlement de l’arriéré,
  • qu’il avait rencontré l’acheteur potentiel de l’immeuble aux côtés du gérant de la société bailleresse et avait proposé un bail de courte durée avec une de ses filiales
  • et que tous les courriels sur la fin du bail avaient été échangés entre la bailleresse et le dirigeant ou la directrice juridique de la société mère, la cour d’appel a pu retenir que la société mère avait créé une apparence trompeuse propre à permettre au bailleur de croire légitimement qu’elle s’était substituée à sa filiale dans l’exécution du bail.

Ayant relevé que la créance du bailleur, au titre de laquelle il avait fait opposition au paiement du prix de cession du fonds de commerce de la société locataire, était celle qui faisait l’objet de l’instance et qui était consacrée par l’arrêt, la cour d’appel a pu en déduire que la nouvelle société locataire, en versant le prix de vente entre les mains du cédant nonobstant cette opposition, avait violé les dispositions des articles L. 141-14 et suivants du Code de commerce.

Cour de cassation, 3e chambre civile, 12 Décembre 2019 n°18-23.223

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