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Publié le 23 Fév 2014

Abattement de la valeur locative en raison d’une clause d’accession

Le présent arrêt présente un double intérêt. Il permet en premier lieu de rappeler les principes applicables en matière de clause d’accession, et en second lieu de préciser le mode de calcul de la valeur locative des locaux en présence d’une clause d’accession en fin de jouissance. A ce dernier titre, l’abattement de la Cour d’appel validé par la Cour de Cassation est extrêmement conséquent.

En l’occurrence, le principe de la fixation du loyer à la valeur locative n’était pas discuté puisque les locaux à usage de cinéma étaient monovalents, mais au cours du bail, la société preneuse avait transformé un logement en cinquième salle.

Le bail stipulait que le preneur s’obligeait à « laisser en fin de location les lieux loués dans l’état où ils se trouvent avec toutes les améliorations, travaux utiles, embellissements que le preneur aurait pu faire, sans pouvoir réclamer aucune indemnité du bailleur à moins que celui-ci ne préfère le rétablissement des lieux dans leur état primitif ».

Il convenait donc en premier lieu de déterminer la date à laquelle les améliorations faisaient accession. Rappelons que plusieurs hypothèses peuvent se présenter :

– si le bail stipule que l’accession intervient « à l’expiration du bail » ou « en fin de bail », le bailleur ne pourra se prévaloir des améliorations que lors du second renouvellement suivant l’exécution des travaux, alors que s’il s’agit de travaux modifiant les caractéristiques des locaux, leur prise en compte se fait à l’occasion du premier renouvellement suivant leur exécution ;

– si l’accession est stipulée « en fin de jouissance ou « à la sortie des lieux », le bailleur ne pourra jamais s’en prévaloir pour l’estimation de la valeur locative ;

– si une clause d’accession est stipulée sans que la date soit précisée, il faut rechercher la commune intention des parties et, dans ce cas, il a été jugé qu’en présence d’une clause de nivellement, l’accession devait être considérée en fin de jouissance (Cass. 3e civ., 7 févr. 2007 : Administrer mai 2007, p. 35), tandis que la clause prévoyant seulement l’absence de droit à indemnisation du preneur lors du départ ne s’opposait pas à une accession en fin de bail (CA Paris, 16e ch., sect. B, 11 oct. 2002 : AJDI 2003, p. 35) ;

– si aucune clause n’est insérée, l’accession s’opère en fin de bail, mais ses effets sont reportés au second renouvellement (CA Paris, 16e ch. B, 7 févr. 2008, n° 07/07733, SCI du Square c/ Yahiaoui : JurisData n° 2008-359030 ; Loyers et copr. 2008, comm. 134).

Dans l’arrêt commenté, la clause ne prévoyait pas expressément la date à laquelle l’accession devait intervenir, mais les juges ont décidé « qu’une telle clause signifiait bien, dans la commune intention des parties que, le renouvellement du bail était incompatible avec la remise des lieux dans leur état primitif, la clause d’accession ne pouvait jouer qu’à la fin des relations contractuelles ».

Une fois déterminée la date à laquelle devait intervenir l’accession des améliorations, il convenait d’évaluer la valeur locative en faisant abstraction des travaux réalisés pour la création de la cinquième salle de cinéma. Il était envisagé soit de reconstituer abstraitement les locaux avant travaux soit de procéder à un abattement forfaitaire sur la valeur locative après travaux.

La cour d’appel de Colmar avait confirmé le jugement de première instance qui avait appliqué un abattement forfaitaire de 25 % que la société locataire critiquait, l’estimant insuffisant. Sur ce point, la Cour de cassation a estimé que la cour d’appel avait souverainement estimé la valeur locative en adaptant le mode de calcul qui lui est apparu le meilleur.

Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 18 juin 2013 n°12-22226

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